JACK ARNOLD (1ère partie)
En quelques films, Jack Arnold marque à jamais le cinéma fantastique de son empreinte. Spécialiste de la série B, il reste aujourd’hui le réalisateur le plus célèbre et le plus représentatif de la science-fiction des années 50.
Né le 14 octobre 1912 dans le Connecticut, Jack Arnold fait ses débuts artistiques à la fin des années 30 comme acteur de théâtre. C’est durant la Seconde Guerre mondiale qu’il fait ses premiers pas dans la réalisation par le biais de documentaires qu’il tourne pour l’US Air Force et le Département d’État. Après l’armée, il poursuit dans le court-métrage et sera nominé aux Oscars. Engagé par la Universal, il réalise son premier film en 1953.
LE RETOUR DE LA SF
C’est le début des années 50. Sur les écrans des cinémas américains déferlent westerns et comédies. Mais entre les coups de revolvers et les éclats de rire, un genre cinématographique renaît de ses cendres : la SF, peu présente durant les années 40. C’est à DESTINATION MOON (DESTINATION MOON, Irving Pichel, 1950), un film au budget modeste, que l’on doit cette renaissance. Produit par George Pal (producteur de LA GUERRE DES MONDES), cette histoire de voyage dans la lune rapporte gros et déclenche aussitôt un véritable raz-de-marée de productions SF à la qualité souvent inégale. Chaque studio nous propose alors son grand film. Pour la Fox, ce sera LE JOUR OÙ LA TERRE S’ARRÊTA (Robert Wise, 1951) ; pour la RKO, LA CHOSE D’UN AUTRE MONDE (Christian Nyby, 1951) et pour la Universal, LE MÉTÉORE DE LA NUIT que réalise Jack Arnold en 1953.
LE MÉTÉORE DE LA NUIT (IT CAME FROM OUTER SPACE, 1953)
Pour ses débuts en SF, la Universal voit grand. Le scénario adapte une nouvelle du célèbre auteur Ray Bradbury. On opte pour une réalisation en trois dimensions (premier film SF en relief), un nouveau son stéréo ainsi qu’un nouveau format d’image. Pas de doute, la Universal croit fermement aux capacités de Jack Arnold qui en est seulement à sa deuxième réalisation. Une confiance qu’il ne trahira pas comme le prouvera le fulgurant succès du film au box-office.
Produit par William Alland et adapté par Harry Essex, l’histoire du film tourne autour du crash d’un vaisseau spatial près d’une petite ville américaine. Afin de réparer leur astronef et de quitter au plus tôt la Terre, les extraterrestres, xénomorphes, utilisent leur pouvoir de dupliquer l’apparence de n’importe quel être humain. Mais bientôt le subterfuge est découvert par la population locale, qui décide aussitôt d’exterminer les étrangers. Heureusement pour les xénomorphes, un scientifique leur viendra en aide et leur permettra de quitter la Terre sains et saufs.
Pour ses débuts en SF, Jack Arnold se voit attribuer un sujet classique du genre. Mais s’il est encore ici question d’extraterrestres, le film parvient néanmoins à se détacher du reste de la production actuelle par sa vision pacifique de ces derniers. Chose bien rare en ces temps de guerre froide où l’extraterrestre, à l’image du communisme, était souvent un agressif envahisseur pour le peuple américain (voir L’INVASION VIENT DE MARS et LA GUERRE DES MONDES).
Sans doute séduit par cette originalité et par la mise en scène efficace, le film est un succès auprès du public et conforte Jack Arnold dans la chaise de réalisateur, place qu’il retrouve en 1954 pour…
L’ÉTRANGE CRÉATURE DU LAC NOIR (CREATURE FROM THE BLACK LAGOON, 1954)
C’est durant le tournage du MÉTÉORE DE LA NUIT que Jack Arnold entend parler pour la première fois ce cette histoire de créature aquatique. En effet, alors que notre réalisateur met en scène ses xénomorphes, le producteur William Alland lui présente le premier jet d’un scénario écrit par un certain Maurice Zinn. Arnold trouve le sujet intéressant, et avec l’aide des scénaristes du MÉTÉORE DE LA NUIT il écrit le script définitif. Espérant renouer avec le succès de ses monsters movies des années 30 (voir DRACULA et autres FRANKENSTEIN), la Universal n’hésite pas un seul instant à acheter les droits du scénario et d’en confier la réalisation en 3D à son nouveau fils prodigue, Jack Arnold.
Quelque part en Amazonie, le squelette fossilisé d’une main palmée est découvert. Intriguée par cette découverte, une équipe de scientifiques se mobilise et se rend sur place en espérant trouver le reste du squelette de ce qui pourrait bien être le chaînon manquant. Mais ils trouveront bien plus que de simples ossements puisqu’une de ces créatures est toujours vivante…
Défi majeur du film : offrir aux spectateurs une créature originale et effrayante. C’est sur une suggestion de Jack Arnold lui-même que Bud Westmore (responsable du département maquillage de la Universal) réalisera le costume de cette dernière. En effet, Jack Arnold propose que l’on prenne la figurine des Oscars américains et que l’on y rajoute une tête de poisson et des nageoires. Westmore s’exécute et fabrique le costume dont le résultat final est en tous points remarquable. Pour enfiler la panoplie, le réalisateur choisit deux acteurs : Ben Chapman (cascadeur de son état, il interprète toutes les scènes terrestres) et Ricou Browning (aux capacités respiratoires prodigieuses, il se charge de toutes les scènes aquatiques). Ce dernier est devenu depuis le créateur de la série TV FLIPPER LE DAUPHIN et le responsable des séquences sous-marines de L’ESPION QUI M’AIMAIT.
Fort de son exotisme, de son suspense et des charmes de Julie Adams, le film est une réussite à la fois commerciale et critique. Succès oblige, la Universal réclame immédiatement une suite à Jack Arnold…
- Dave Altout et Sandrine B.-
(Article publié dans le fanzine Midian numéro 2 de février 1994)
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