J-1 avant cette fin du monde annoncée en fanfare pour demain, vendredi 21 décembre 2012… Avez-vous pris toutes vos précautions ? Êtes-vous fin prêt pour l’accueillir comme il se doit ? Saurez-vous y survivre ? Ah oui, c’est vrai : vous n’y croyez pas… Moi non plus, je vous rassure. Et pourtant, certains sont persuadés qu’elle va se produire demain. Et si ?… En attendant cette fin apocalyptique, Les Échos d’Altaïr vous proposent un survol de la fin du monde dans l’univers de la Science-Fiction, avec l’avis des spécialistes !
DES FINS DU MONDE…
On nous la prédit depuis que l’homme existe, cette fin du monde ! On ne compte plus le nombre de fois où on nous l’a annoncée solennellement. La dernière année où elle devait avoir lieu était 2000. On prévoyait même un bug informatique à l’échelle planétaire (ce qui est moins grave qu’une fin du monde, vous en conviendrez). Il ne s’est finalement rien passé… Comme ça n’a pas marché, cette année on a décidé de nous la ressortir, plus belle que jamais, avec ses expositions, ses débats, ses livres, ses documentaires, ses chaînes, ses compteurs, etc. Vous ne pourrez pas dire : « On ne m’avait pas prévenu ! » Il y a même un bouquin qui vient de paraître pour vous donner en quelques leçons les moyens de survivre. Oui, parce que cette année c’est du sérieux. Le calendrier maya a dit : « Après 2012 c’est fini ! J’arrête de compter ! » Alors ?…
En tout cas il y en a une qui n’a pas attendu aujourd’hui pour célébrer à sa façon la fin du monde, c’est la SF ! Elle a tout prévu depuis fort longtemps, elle, cette vieille dame respectable, et vous a même inventé toutes les fins du monde possibles : collision avec un astéroïde, explosions nucléaires, invasion extraterrestre, virus mortel, apocalypse zombie, cataclysme naturel, pollution, révolte des animaux, expérience scientifique ratée, et j’en oublie des tonnes. Pierre Versins déclare dans son Encyclopédie de l’Utopie et de la Science-Fiction :
« Il faudra d’abord savoir qu’il y a cataclysme et cataclysme : certains écrivains d’emblée démolissent tout, vandales définitifs pour lesquels tout est mauvais de l’homme et de la Terre. D’autres se contentent de changer certaines conditions, bricoleurs sans spécialité définie ou réparateurs qualifiés. À ceux-ci les déluges, les collisions planétaires manquées, l’assèchement soudain des océans, l’empoisonnement passager de l’atmosphère de ce globe, les épidémies (issues des pestes médiévales), les guerres mondiales, interplanétaires, la disparition brutale d’une loi de la nature, ou l’altération des conditions habituelles de vie sur la Terre, et les invasions, croisades, guerres saintes ou moins saintes, bref, tout ce que nous avons inventé pour ajouter à ce que la nature nous propose. À de certains moments, c’est la nature qui gagne, mais notre imagination n’est pas en reste et, en définitive, il n’y a pas d’épouvante aussi féroce que les épouvantes que nous fabriquons. Dès qu’il s’agit de quantité, à l’homme la prépondérance. La nature se rattrapera dans le détail. »
LA FIN D’UN MONDE…
Mais d’abord il faudrait nous mettre d’accord sur l’expression « fin du monde »… « Fin du monde » sous-entend qu’il n’y aura plus de monde : donc disparition pure et simple de la Terre, point barre ! Cependant la SF a décidément bien du mal à supprimer notre planète bleue. Qu’il s’agisse de romans ou de films, la Terre est très rarement détruite. Il demeure toujours au moins un survivant après l’apocalypse… Dans ce cas il ne s’agit pas vraiment de fin du monde, mais de « fin d’un monde », avec une race humaine qui tente de se reconstruire en repartant à zéro. On ne compte plus les œuvres qui mettent à l’honneur un monde post-apocalyptique. Voici ce que déclare à ce propos, non sans humour, Stan Barets dans son livre Le Science-Fictionnaire (tome 2) :
« Fin du monde ! Fin du monde ! C’est vite dit ! Même après l’apocalypse, ça continue encore… L’esprit humain semble incapable d’imaginer le définitif ou le néant… Alors les fins du monde sont toujours truquées. (D’ailleurs si tout le monde avait disparu, qui raconterait l’histoire ?) Et le thème se divise en deux intentions très claires. Ceux qui souhaitent détruire. Et ceux qui veulent reconstruire quelque chose de différent, mais ne peuvent pas se contenter de faire voter par le parlement quelques amendements aux lois actuelles. Ils ont besoin d’abord de faire table rase… »
ESPRIT TORDU…
Et c’est là que, avec toutes ces histoires de fin du monde, on se rend compte d’une chose : l’Homme est décidément un sacré malade mental, ou un maso-pessimiste (il existe des maso-optimistes, si, si !) qui se complaît à inventer différentes façons d’entraîner son extinction ! Il lui faut détruire la Terre, ou au moins la race humaine. J.G. Ballard déclare dans l’Encyclopédie Visuelle de la Science-Fiction :
« Les visions de cataclysmes mondiaux constituent une des catégories les plus importantes et les plus mystérieuses de la science-fiction. Dans sa forme classique, le thème est apparu des milliers d’années avant la science-fiction moderne. Je pense que la science-fiction est en fait un descendant du récit de catastrophe. Depuis le déluge du mythe zodiacal de Babylone de Gilgamesh jusqu’aux histoires fantastiques issues de la super-science du XXe siècle, l’homme n’a connu aucune limite à son besoin d’inventer de nouveaux moyens de destruction du monde qu’il habite. À mon avis, dès que l’homme a compris que cette planète existait indépendamment de lui, il a voulu la détruire ; exactement comme un enfant qui se réveille seul dans son berceau et cherche soudain à tout casser autour de lui. »
Et J.G. Ballard va plus loin : « L’étude psychiatrique des fantasmes et des rêves de malades mentaux montre que la notion de destruction du monde est latente dans l’inconscient ».
De toute façon on le sait déjà : le plus grand danger ne vient pas de l’espace mais de l’homme lui-même qui finira bien par détruire pour de vrai le monde sur lequel il vit…
ET LES ÎLES DANS TOUT ÇA ?…
Eh oui ! Et là, je l’avoue bien sûr, c’est le Néo-Calédonien que je suis qui parle ! Les fins du monde sont toujours montrées se déroulant d’un continent à l’autre, mais les îles sont-elles concernées ou représentent-elles des oasis de survie ?… Si une guerre nucléaire devait éclater, les premières nations à être atteintes par les bombes seraient forcément les États-Unis, la Chine, la Russie, le Japon, l’Angleterre et la France. Qui pointerait ses missiles vers la Nouvelle-Calédonie, Tahiti ou Hawaï, hein ? Ridicule ! Mais inutile de pousser un ouf de soulagement, chers îliens, les nuages radio-actifs finiraient tôt ou tard par nous rejoindre, et là… Non, le plus dangereux pour nous serait l’impact d’un astéroïde là où il a le plus de chance de s’écraser : dans l’océan… Le raz-de-marée qu’il provoquerait relève du domaine de l’inimaginable. Même nos surfeurs les plus compétents n’auraient pas le temps d’en profiter, les pauvres… Tiens, et puisqu’on parle d’îles et de fins du monde, laissons la parole à Jacques Van Herp qui écrit dans Panorama de la Science-Fiction :
« Le thème des fins du monde est l’un des plus exploités, mais c’est un thème à la fois attirant et difficile. Attirant car chacun se croit capable d’en écrire, en mettant en scène ses préoccupations, ses inventions, ses craintes. Difficile car, plus qu’aucun autre, il ne supporte pas la médiocrité, surtout dans les récits racontant la reconstruction d’une civilisation. Il est mal aisé d’échapper au thème de Robinson sur son île, et, bien souvent, les auteurs ne font que répéter L’Île Mystérieuse, le suspense en moins, les bavardages pseudo-philosophiques en plus. »
THIS IS THE END…
Avec le décalage horaire, la Nouvelle-Calédonie sera parmi les premiers pays au monde à entrer, demain, dans ce jour fatidique du 21 décembre 2012 ! Que notre bonne vieille France se rassure : nous scruterons le ciel avec attention toute la journée et serons les premiers à l’avertir en cas de danger ! Ainsi vous aurez peut-être le temps de vous réfugier tous (ça risque de faire du monde tout de même) à Bugarach, seul bastion au monde à résister à l’apocalypse. Alors ne vous plaignez pas, tandis que nous, mis à part enfiler nos combinaisons de plongée et nous harnacher de nos bouteilles à oxygène…
« Après l’apocalypse, que reste-t-il de nos sociétés ? Les mondes à venir, même quand ils ont été dévastés par la guerre, le feu, la glace, la maladie ou les virus informatiques, ne sont le plus souvent qu’un miroir déformé de nos mégalopoles contemporaines dont les problèmes et les pathologies (violence, racisme, ségrégation, perte du lien social, crise écologique…) sont volontairement amplifiés pour mieux nous inciter au repentir et, peut-être, à changer nos habitudes avant qu’il ne soit trop tard. » (Alain Musset, Sciences et Science-Fiction)
THE SURVIVEUSE
Pour finir sur une pointe d’humour, je vous invite à lire cette sympathique et courte nouvelle de Sandra, The Surviveuse, sur son blog Nouvelles en Vrac ! Vous ne le regretterez pas…
- Morbius -
Ouvrages cités : L’Encyclopédie de l’Utopie et de la Science-Fiction (Pierre Versins, éd. L’âge d’homme), Encyclopédie Visuelle de la Science-Fiction (éd. Albin Michel), Le Science-Fictionnaire (Stan Barets, éd. Denoël), Panorama de la Science-Fiction (Jacques Van Herp, éd. Le Francq), Sciences et Science-Fiction (éd. de La Martinière).
(Les Échos d’Altaïr ne sont en aucun cas responsables des liens publicitaires dans les textes)
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