Jean-Claude Michel est un acteur du fanzinat de la première heure. Cette interview permet de revenir sur le parcours de ce collectionneur passionné et sur ses rencontres avec Forrest J. Ackerman, Philippe Druillet, Jean-Pierre Bouyxou, Alain Schlockoff, Christophe Gans ou encore Jean-Pierre Putters. Mais surtout sur son livre dédié à l’acteur Tod Slaughter qui sortira dans le courant de l’an prochain, une carrière un peu oubliée et sur laquelle Jean-Claude Michel travaille depuis 50 ans. Nous le remercions de nous partager sa passion sur Les Échos d’Altaïr.
Trapard : Bonjour Jean-Claude Michel. Ta passion pour le cinéma et pour le cinéma fantastique est une longue histoire. Peux-tu nous expliquer comment elle est née ?
Jean-Claude : Elle est née très tôt, et tout à fait par hasard. J’avais douze ans, et je ne sais plus pour quelle raison, une amie de ma mère devait me garder quelques jours en l’absence de cette dernière. Cette amie habitait au Quartier Latin, et un soir, elle avait projeté de m’emmener au cinéma, et nous sommes tombés devant le « Le Saint-Michel » avec au programme « Deux nigauds contre Frankenstein ». Je ne connaissais pas, à cet âge, le duo Abbott & Costello, et encore moins les trois monstres qui allaient me terroriser durablement… Ça doit faire sourire à notre époque, où des gosses du même âge voient des films comme « Cannibal Holocaust » ou « L’enfer des zombies », mais il faut rappeler qu’à sa sortie, « Deux nigauds contre Frankenstein » fut bel et bien assorti d’une interdiction aux moins de 16 ans ! Je ne sais comment ni pourquoi la caissière ne fit aucune objection à mon entrée dans la salle, toujours est-il que je vis le film qui devait alimenter mes cauchemars durant une bonne semaine, au point que je refusais de dormir sans la présence rassurante du gros chien de cette amie !
En une soirée, je venais donc de découvrir Larry Talbot le loup-garou (Lon Chaney Jr.), le comte Dracula (Bela Lugosi), et le Monstre de Frankenstein (Glenn Strange). C’est ce dernier surtout qui m’impressionna. En fait, lorsque j’eus l’occasion de revoir le film quatre ans plus tard, au « Cyrano Sébastopol », je m’aperçus, en contemplant les photos du film, que j’avais plus ou moins occulté de ma mémoire le vampire joué par Lugosi, malgré ses transformations en chauve-souris. C’étaient évidemment le loup-garou et la créature de Frankenstein qui avaient alimenté mon imagination, par leur aspect horrifique. Durant la semaine de sa reprise dans ce petit cinéma du boulevard de Sébastopol, je dus revoir le film une bonne demi-douzaine de fois, au point de connaître par cœur certaines répliques (le film passait en VF), et de m’en souvenir encore soixante-sept ans plus tard – bien que n’ayant revu le film qu’en VO, à partir de sa reprise à l’Action-Écoles en 1981…
« Je vis le film qui devait alimenter mes cauchemars durant une bonne semaine, au point que je refusais de dormir sans la présence rassurante du gros chien de cette amie ! »
J’ajoute que, hasard des programmations, je ne devais remettre les pieds au « Saint-Michel » que bien des années plus tard, lors de la sortie du « Nosferatu » de Werner Herzog, avec Klaus Kinski. C’est évidemment la même salle qui devint la victime des intégristes catholiques lorsqu’elle « osa » programmer « La dernière tentation du Christ ».
Comment en es-tu arrivé à te spécialiser dans le cinéma d’horreur britannique ? En ce moment, tu finalises ton livre sur le comédien Tod Slaughter. Peux-tu nous dire où il en est, et nous parler de sa genèse ?
En fait, je ne me suis pas réellement spécialisé dans le cinéma d’horreur britannique, j’allais voir tous les films fantastiques qui sortaient sur Paris (puis ressortaient parfois en banlieue). Je pris l’habitude d’acheter tous les mercredis « L’Officiel des Spectacles » et de me concocter un programme assez éloigné des films qu’allaient voir les mômes de mon âge – ce qui ne m’empêchait nullement de voir avec eux d’autres genres de films qui passaient dans les cinq salles de mon quartier (trois à Aubervilliers, deux à Pantin), généralement des bandes d’aventures, des polars, ou des comédies (Laurel et Hardy sont demeurés mes dieux, jusqu’à ce jour)… Mais j’étais le plus souvent seul pour mes expéditions au « Midi-Minuit » ou à « l’Artistic-Douai » de la place Clichy, devenu plus tard bureau de poste. Un article paru dans le magazine « Tout Savoir » m’avait appris que le « Frankenstein » de 1931 avait eu pour vedette Boris Karloff, c’est pourquoi je me retrouvai un jour de 1954 au « Cinémonde-Opéra » pour y voir « Deux nigauds contre le Dr. Jekyll & Mr. Hyde », en VO… J’allais encore à l’école primaire lorsque je découvris ce film, et du même coup, celui qui devait rester pour toujours mon acteur préféré !
Dans ces mêmes années cinquante, je ne devais rater pratiquement aucun des films du genre qui sortaient sur Paris, un des premiers étant « Le spectre de Frankenstein » avec Lon Chaney Jr. et Bela Lugosi, puis « Frankenstein rencontre le Loup-Garou ». Il y eut une mémorable ressortie de « L’homme invisible » de James Whale, d’autres titres comme « Docteur Cyclope », « Tarantula ! », « La main de la momie », « Le château noir », « Le château de la terreur », « Les survivants de l’infini », « Le mystère du château maudit », « L’étrange créature du lac noir » et ses deux suites, « La guerre des mondes », « Planète interdite », « L’homme au masque de cire », « La bête aux cinq doigts », etc.
« Je pris l’habitude d’acheter tous les mercredis « L’Officiel des Spectacles » et de me concocter un programme assez éloigné des films qu’allaient voir les mômes de mon âge. »
Le premier « Hammer Film » que je vis fut sans doute « Le monstre » de Val Guest, suivi quelque temps plus tard de « La marque » du même réalisateur. J’avais lu, dans un article de « Cinémonde », que les mêmes studios tournaient un remake de « Frankenstein », je l’attendais avec impatience, et à l’automne 1957 je devais découvrir le duo de choc Peter Cushing – Christopher Lee, avec plusieurs chefs-d’œuvre au fil des ans, dont bien entendu « Le cauchemar de Dracula », présenté en avant-première à « L’Avenue », rue du Colisée, un mardi soir ! À l’époque, j’habitais une chambre de bonne avenue Mac-Mahon. Le film de Terence Fisher m’avait aussi traumatisé. À l’époque, c’était le plus sanglant qu’il m’ait été donné de voir ! Dans l’intervalle, en 1958, le « Frankenstein » de James Whale était ressorti au « Midi-Minuit », autre traumatisme durable mais pour d’autres raisons…
En 1959, je fis mon premier voyage en Grande-Bretagne, mais en-dehors de Londres, je ne vis donc aucun film, mais une amie anglaise m’envoya ensuite mon premier numéro de « Famous Monsters », c’était le numéro 4, avec le Martien de « La guerre des mondes » en couverture. Je publiai une petite annonce dans le magazine « Fiction », désirant trouver d’autres numéros du magazine, et j’eus la surprise de recevoir une lettre de Forrest J. Ackerman en personne, qui m’envoyait tous ceux déjà parus ! Ce fut le début d’une très longue correspondance, et je devais devenir le « foreign correspondant » de « Famous Monsters » dès le numéro 16. Nous échangions des photos, des affiches, des livres et des magazines, et bien entendu des informations. Je me souviens lui avoir envoyé pas moins de 25 exemplaires du numéro spécial de « Cinéma 57″ consacré au Fantastique…
C’est Forry Ackerman qui m’envoya, en 1964, plusieurs lobby cards d’un double-programme, « Horror Maniacs » et « Strangler’s Morgue », avec pour vedette un certain Tod Slaughter, dont j’entendais parler pour la toute première fois. Il était qualifié comme étant « l’Europe’s Horror Man », je demandai des précisions à Forry, mais je découvris qu’il savait fort peu de choses sur cet acteur dont « Famous Monsters » n’avait jamais parlé. Quelques notules avaient bien été publiées dans « Castle of Frankenstein », un magazine rival, plus « adulte » que celui d’Ackerman, mais avec des dates qui correspondaient aux sorties américaines, souvent tardives par rapport aux sortie britanniques…
« J’eus la surprise de recevoir une lettre de Forrest J. Ackerman en personne, qui m’envoyait tous les « Famous Monsters » déjà parus ! »
Les titres eux-mêmes avaient été changés par Hoffberg, le distributeur américain, et les films étaient plus ou moins raccourcis. « Strangler’s Morgue » était en fait « The Curse of the Wraydons » (1946), et « Horror Maniacs » était « The Greed of William Hart » (1948) – et le double programme affublé d’une affiche carrément hideuse.
Intrigué, je commençai donc des recherches approfondies, j’écrivis au fil des ans des centaines de lettres – c’était l’époque pré-Internet, est-il besoin de le rappeler ? J’obtenais le plus souvent des réponses évasives, mais parfois j’avais la surprise de constater que quelques correspondants portaient le même intérêt que moi à cet acteur, décédé en 1956, la même année que Bela Lugosi et apparemment tombé dans l’oubli. Je dois dire que cet « oubli » m’arrangea à différentes occasions, car je devais obtenir de différentes compagnies américaines des photos originales à peu de frais, les films de cet acteur étant généralement oubliés. Je devais être alors le seul client potentiel pour ce genre de matériel publicitaire…
Inutile de dire que cette situation a changé depuis pas mal de temps, et qu’il est vain de vouloir se procurer de telles photos de nos jours ! Quand par extraordinaire on en trouve, une simple photo noir et blanc peut atteindre un prix extravagant – surtout si ce n’est pas juste une reproduction ! Pour ne rien dire, évidemment, des affiches, lobby cards ou press-books des mêmes films.
En 1974, je publiai donc un premier article sur Tod Slaughter, dans « L’Écran Fantastique », ce qui me valut les félicitations de Jean-Claude Romer, que je connaissais depuis 1962. Il y eut ensuite un article plus détaillé dans le magazine anglais « Headpress » – dans l’intervalle, j’avais pu voir des films de Slaughter en vidéo, le premier étant « Sweeney Todd », en VHS à l’époque, car la chaîne Channel Four commençait à programmer ses films. Le même article, encore augmenté, parut ensuite dans « Splatting Image », le magazine allemand de Graf Haufen. Puis le regretté Pierre Charles me demanda un article sur « The Greed of William Hart », l’ancêtre de « L’impasse aux violences », puisque John Gilling, le réalisateur de ce dernier film, était déjà le scénariste et l’assistant-réalisateur de la version précédente, en 1948, dirigée par Oswald Mitchell. Tod Slaughter et Henry Oscar (le directeur de la pension dans « Les maîtresses de Dracula ») y incarnaient les résurrectionnistes assassins, rôles repris dans le remake par Donald Pleasence et George Rose… Il y eut ensuite un numéro de « Horror Pictures », magazine auquel j’avais collaboré dans le temps, mais cette fois il s’agissait d’un e-magazine, consultable sur le site de Gérard Noël.
« Tout ce travail entrepris depuis si longtemps ne pouvait que conduire à l’idée d’un bouquin complet sur Tod Slaughter. »
Tout ce travail entrepris depuis si longtemps ne pouvait que conduire à l’idée d’un bouquin complet sur Tod Slaughter. Un autre livre, le premier sur l’acteur, vient tout juste de paraître en Grande-Bretagne, sous la plume de trois auteurs dont deux sont des amis de longue date, mais le livre français aura une structure différente, car même si un long chapitre y est consacré à la longue carrière du comédien – plus de cinquante années de théâtre, de 1905 à 1956, soit des centaines de pièces – l’essentiel en sera le compte-rendu détaillé de sa filmographie (cinéma et télévision), ses participations à des émissions radiophoniques, ou à des disques 78t, etc. En ce sens, les deux livres devraient se compléter parfaitement…
Peux-tu nous parler de ton histoire avec le fanzinat et nous expliquer quelle a été ton implication avec le magazine L’Écran Fantastique ?
J’avais d’abord écrit un texte appelé « La dynastie des Frankenstein », qu’avec l’inconscience de mes 18 ans, j’envoyai à la rédaction du magazine « Satellite ». À ma grande surprise il fut accepté d’emblée. Je ne fus pas payé, mais d’un seul coup je me sentais très important, je roulais des mécaniques dans les rues de ma banlieue – je plaisante ! Il fut publié dans leur magazine annexe, « Les Cahiers de la Science-Fiction », à la suite du roman de Philip K. Dick, « Les mondes divergents ». J’écrivais aussi dans le courrier des lecteurs de « Cinémonde », en ardent défenseur du cinéma fantastique, et en 1962, un des rédacteurs du magazine, Henri Rode, qui préparait un numéro spécial sur ces films, me contacta et j’eus ainsi la parole dans son article… et j’eus aussi la surprise d’être payé, cette fois ! 50 francs sur les 20 francs promis au départ… C’était la vie de château ! C’est ce même article de Cinémonde qui me valut une lettre élogieuse de Jean Boullet. Échange épistolaire qui me valut de vivre chez lui pendant un an. J’y rencontrai certains de ses amis comme Elliot Stein, Ornella Volta, Roland Villeneuve, Roland Lacourbe et surtout Philippe Druillet qui était plus proche de moi par l’âge, et en compagnie duquel je devais faire de longues balades dans le Londres du début des Sixties, en quête de comics « horrifiques » et de monster magazines. Dans le numéro 3 de « Métal Hurlant », Philippe évoquait cette période en disant que j’étais « la première personne avec qui il avait pu parler le galactique » ! Un beau compliment…
Ce long séjour à Londres nous avait évidemment permis de voir un tas de films, inédits en France (à part deux ou trois, mais devenus invisibles), comme « Bride of the Monster », « Grip of the Strangler », « Corridors of Blood », « I Was a Teenage Frankenstein », « War of the Colossal Beast », « The Cyclops », « House of Frankenstein », « House of Dracula », « Son of Dracula », « War of the Satellites », « Blood of Dracula », « I Married a Monster from Outer Space », « The Black Sleep », etc. Par la suite j’aurais l’occasion de revenir à Londres une quinzaine de fois, mais la disparition de beaucoup de salles de quartier avait causé des ravages, et la « moisson de films » fut bien moins spectaculaire qu’en ces lointaines années. Par contre, d’autres voyages à Bruxelles étaient toujours enrichissants, et je devais y habiter par deux fois, en 1969/70 et en 1974/75. Mais j’anticipe ! Revenons aux années 60.
« Philippe Druillet évoquait cette période en disant que j’étais « la première personne avec qui il avait pu parler le galactique » ! Un beau compliment… »
Plus tard, en 1964, j’eus une longue correspondance avec Jean-Pierre Bouyxou, qui habitait Bordeaux et travaillait pour un journal local. Il vint chez moi, à Aubervilliers, en 1965. Je lui présentai Raphaël-Georges Marongiu, rencontré plusieurs mois auparavant, et comme Jean-Pierre était en contact avec Gérard Temey et Jean-Pierre Fontana, qui faisaient le fanzine « Mercury », nous fîmes (Bouyxou, Marongiu et moi) un fanzine appelé « Mercury-Bis », dont le premier numéro était un spécial « Boris Karloff » ! Robert Florey lui-même y avait en quelque sorte participé en nous envoyant par la poste, en paquet simple… une des affiches originales françaises, la 120×160, du « Frankenstein » de James Whale… Malheureusement, les fanzines de l’époque ne pouvaient que reproduire pauvrement, en noir et blanc, une telle affiche – affiche qui fut renvoyée en courrier recommandé à Robert Florey, il va sans dire !
En 1966, je passais neuf mois de ma vie en sanatorium, mais c’est là que je reçus une première lettre d’Alain Schlockoff, qui projetait de continuer l’aventure « Mercury-Bis », et me demandais d’y participer. Je suppose qu’il avait dû demander la même chose à Bouyxou et Marongiu, mais sans succès apparemment, car je fus le seul à accepter la proposition. Il y eut donc bel et bien un second numéro de « Mercury-Bis », qui devait être le dernier.
Le second fanzine « schlockoffien », qui devait assez rapidement devenir un magazine, fut en fait « Horizons du Fantastique ». Je participai à plusieurs numéro, mais ensuite Alain se brouilla avec Dominique Besse, qui avait pris la direction du magazine, et je cessai donc toute collaboration avec ce dernier.
Nous devions donc inventer un nouveau fanzine, et c’est comme ça que naquit « L’Écran Fantastique » en 1969. Alain avait proposé « Fameux Monstres du Cinéma », et Dominique Abonyi (plus tard Dominique Hass) « La Grosse Mite de Roubaix » – je cherche encore le jeu de mots, s’il existe, et ce que venait faire Roubaix dans cette histoire. Je proposai juste « L’Écran Fantastique », et c’est finalement ce qui fut retenu. Dominique et moi, en furent les premiers rédacteurs en chef, pendant deux numéros. Je partis ensuite en Belgique pour une année; je travaillais chez Titra-Films à Bruxelles, et Alain devint donc l’unique responsable du fanzine, mais je devais y collaborer régulièrement jusqu’au début des années 80.
« Alain avait proposé « Fameux Monstres du Cinéma », et Dominique Abonyi « La Grosse Mite de Roubaix ». Je proposai juste « L’Écran Fantastique ».
En même temps, il y eut les fanzines « Métaluna », « Astarté », toujours avec Alain. Sans parler du Festival annuel à partir de 1972, auquel je collaborais parfois avec des choix de films.
J’écrivais aussi pour des fanzines américains (« Cinefantastique », qui fut d’abord un fanzine), anglais, belges, et bien sûr français, surtout après la longue période « schlockoffienne ». Dont « Heretic » puis « Nostalgia » avec Lucas Balbo. Et même « Mad Movies », mais anonymement, pour sa rubrique « Dictionnaire du Fantastique », signée du seul Jean-Pierre Putters.
Au fil de ta passion, tu as sûrement fait des rencontres avec des comédiens, des cinéastes et des collectionneurs. Peux-tu nous en raconter quelques-unes ?
En fait, j’ai le plus souvent rencontré d’autres fans, souvent créateurs de fanzines ou de magazines, au fil des ans, Forrest J Ackerman, Jean Boullet, Philippe Druillet, Jean-Pierre Bouyxou, Alain Schlockoff, Dominique Abonyi, Jean-Claude Romer – tous déjà cités – mais aussi Michel Caen, et un peu plus tard, Alain Petit, Jacques Goimard, Pierre Gires, Jean-Pierre Putters, Alain Venisse, Pierre Charles, Gérard Noël, Stéphane Bourgoin, mais aussi Richard Klemensen (aux USA), et pas mal d’autres avec lesquels j’eus des correspondances parfois durables, comme Richard Gordon (le producteur, qui me raconta des anecdotes sur Tod Slaughter qu’il avait pu voir au théâtre). Il y eut aussi Michael Weldon, de « Psychotronic ». Il vint nous voir à Paris au début des années 80, nous allâmes voir « The Black Room » (Le baron Grégor) avec Boris Karloff à la Cinémathèque, et il nous avoua qu’avant ce jour, il n’avait jamais vu un seul film de Karloff sur le grand écran !
Je connaissais aussi, évidemment, Christophe Gans avant qu’il devienne le réalisateur que l’on sait, puisqu’il travailla un temps pour « L’Écran Fantastique ». Côté acteurs, c’est plus restreint, j’en ai évidemment approché certains lors de leur présence au Festival, au Rex ou auparavant, mais parmi ceux avec lesquels j’ai pu parler plus de cinq minutes, il y eut une soirée mémorable dans un grand restaurant de Neuilly avec José Mojica Marins, deux heures en tête-à-tête avec Paul Naschy dans un café de la rue du Faubourg-Montmartre alors qu’on projetait « El gran amor del Conde Drácula » au « Palace » voisin. Chez Jean Boullet, le jour de l’enterrement d’Édith Piaf au Père-Lachaise en 1963, il y eut un repas avec Piéral, qui ne pouvait conduire une voiture, dans la cuisine du pavillon de la rue Bobillot. Toujours chez Boullet, lorsque Marco Ferreri vint parler de son projet de film sur une femme à barbe – rôle qui devait par la suite être attribué à Annie Girardot – il y eut une longue discussion au cours de laquelle Boullet proposa une authentique femme à barbe à laquelle il avait consacré quelques paragraphes dans un de ses articles sur les monstres de foire dans le magazine « Æsculape ». Alain Schlockoff, lui, avait reçu Juan Lopez Moctezuma, dont un film devait être projeté au Festival… Tout petit, chez une amie de ma mère, j’avais rencontré – mais je ne savais pas du tout qui c’était à l’époque – la célèbre Kiki de Montparnasse, qui servit de modèle au peintre Foujita. Mais là on sort du domaine du cinéma ! Kiki devait décéder peu de temps après. Côté théâtre, une amie personnelle est Denise Dax – aucun rapport avec Micheline – qui fut meneuse de revue, interprète de théâtre classique et de boulevard, compagne et partenaire de Michel Simon, et surtout actrice vedette du Grand-Guignol à la fin des années cinquante. Denise aura bientôt 95 ans, elle était encore sur les planches il y a cinq ou six ans, elle conduisait encore sa voiture voici quelques années à peine, et est toujours en pleine forme aux dernières nouvelles !
Que dire de plus ? j’ai quitté Paris en 2015, après y avoir vécu 70 ans (en-dehors des deux séjours en Belgique déjà mentionnés), et suis revenu dans ma Bretagne natale, berceau également de mes ancêtres. Je ne vois désormais des films – anciens ou modernes – qu’en vidéo. Je suppose que, vu le bazar qu’étaient devenues les salles de cinéma dès la fin des années 80, c’est tout aussi bien ! Et la plupart des cinéma que j’aimais ont tous disparus, remplacés par des banques, des bureaux de poste, des supérettes ou des garages. Quand Paris tout entier ressemble à un cimetière, du moins à mes yeux, autant prendre le large… Et quoi de mieux que la Bretagne pour cela !
Merci beaucoup Jean-Claude.
- Interview réalisée par Trapard -
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Un très grand merci à Jean-Claude Michel d’avoir bien voulu partager ses souvenirs merveilleux avec nous. Et un très grand merci également à notre fidèle Trapard.
Superbe interview.
On comprend et on apprend beaucoup de choses.
Merci beaucoup
Passionnant en effet. Merci encore Jean-Claude pour cette interview et pour ton travail.
Personnellement, c’est un ancien libraire de Nouméa qui m’a fait découvrir quelques films avec Tod Slaughter il y a une dizaine d’années en me prêtant un gros coffret américain de films d’horreur inédits des années 30 à 70 en VO. D’où cet article de 2013 :
http://morbius.unblog.fr/2013/08/06/le-fantome-vivant-1933/
Je ne me souviens plus du nom de l’éditeur mais il a sorti le même genre de coffret dédié à la SF avec beaucoup de films non restaurés, mais rares.
Bonne chance pour la suite !
J’ai retrouvé le nom de l’éditeur, c’est Mill Creek Entertainment. Ils ont sorti plusieurs coffrets de classiques de l’horreur, dont plusieurs Tod Slaughter, mais de mauvaise qualité et avec leur logo qui apparait par intermittence sur tous les films.
Passionnante interview , hâte de découvrir ce bouquin sur Tod Slaughter , que j’ai découvert relativement récemment et qui m’a laissé une très grosse impression
Ce livre sur Tod Slaughter devrait sortir l’an prochain. D’autre part, le premier BluRay d’un film de Tod doit sortir chez Kino Lorber aux USA, il s’agit de « The Face at the Window ». Kino m’a contacté pour le commentaire, et j’ai aussi fourni la documentation pour les bonus. Je me souviens des VHS américaines, les copies étaient parfois incomplètes, comme pour « Maria Marten », amputé de dix bonnes minutes, les Américains vont enfin pouvoir découvrir ces films dans des copies parfaites…
Oui, cet interview est effectivement passionnant, que de beaux souvenirs.Merci et bravo pour ce bel interview, l’ami Trapard, et évidement à Jean-Claude Michel.